3 – « Le Quattro Volte »

Je voudrais parler d’un violent coup de coeur pour un film vu récemment, un film magnifique, qui ne ressemble à rien de connu, qui pour certains sera sans doute d’un ennui abyssal, pour d’autres dont moi, un moment magique…
 » I’d like to speak of the passionate interest I felt for a film I’ve seen recently , a magnificent film , unlike anything else , abysmally tedious for some probably , for others like me , a moment of pure magic … »

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D’abord le décor : un espace naturel vaste, indéfini,  escarpé et sauvage mais sans excès ni beauté particulière, des rochers, des arbres, des troupeaux de chèvres, un village, des habitants qui préparent une fête, de la fumée,  le vent …

Un héros, ou quatre, mais c’est le même : un humain- berger, un animal-chevreau, un végétal-sapin, un minéral- le sapin devenu charbon.

Des bruits, les pas de l’homme dans l’herbe sèche , les pierres qui roulent à son passage, ses accès de toux, les cloches des chèvres et les cris du chevreau égaré, les coups de hache et l’écroulement du sapin abattu. Il y a surtout, lancinant, montant de la clairière des charbonniers, le choc sourd et régulier du plat des pelles sur les meules,  puis le tintement pur et cristallin du bois devenu carbone.
Les fils sont fragiles, tendus à se rompre, et vont bien sûr se rompre, le berger trop vieux, usé, malade, le chevreau trop jeune, trop peu armé pour survivre, l’arbre, trop beau, trop droit, magnifique, choisi pour cela, le minéral friable au moindre choc.

Et dans cette extrême lenteur d’un monde où tout se répète à l’infini, un chien affairé, sorte de passeur, tentera frénétiquement et en vain de nouer un temps les fils , d’alerter, d’arrêter le cours de la vie, justement parce qu’il y a une mort en jeu.  Et échouera …  le chien, l’auxiliaire de l’homme, celui qui sait rassembler et remettre en ordre la marche des bêtes, mais n’a pas de pouvoir sur celle des hommes. Encore moins sur celle de la vie et du monde.

Chaque élément traité sur le même plan que les autres semble se dissoudre dans l’autre; pourtant chacun est séparé, seul dans son espèce d’appartenance, incapable de relation avec les autres catégories.   Seuls les sacs de charbon livrés devant les portes nous ramènent au point de départ. Les cycles vont s’enchaîner de nouveau comme s’enchaînent les saisons, les jours avec  les nuits. Pas de paroles, pas d’intrigue, juste le vent et ces coups des charbonniers comme un métronome , scansion du temps qui passe .

« Le quattro volte » de Michelangelo Frammartino
2009. 1 h 28


 15 mars 2011

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